jeudi 30 mai 2013

CP2 Sigmaringen km 626


Cher Maxence,
Nous sommes en Bavière dans le sud de l'Allemagne en direction de Berlin.
Comme pour les hommes on peut dire que certaines villes n'ont pas de chance. Prenons Vichy cette charmante bourgade thermale, il a suffit que Pétain et Laval en fassent la capitale de la zone dite libre en 1940 pour que l'opprobre s'abatte sur cette cité(encore aujourd'hui vichyssois n'est pas un compliment). Et bien c'est un peu le cas de Sigmaringen où nous sommes aujourd'hui. Les deux mêmes suivis par toute la collaboration s'y sont réfugiés en 1945 devant l'avance des armées alliées donnant lieu à un des épisodes les plus bouffons de la seconde guerre mondiale. Et voila un village doté du superbe château de la glorieuse famille des Hohenzollern contraint d'héberger quelques mois des fantoches qui rêvaient d'un retour triomphal en France alors même que les alliés étaient sur les bords du Rhin. Certains étaient plus lucides ou plus cyniques: Louis Ferdinand Celine ne se faisait aucune illusion et jugeait sans pitié ses "co-réfugiés".(lis "d'un château l'autre", c'est édifiant). Lui au moins savait ce qu'il faisait là:" On voulait m'étriper à Paris parce que je représentais l'antijuif, le fasciste, le salaud, l'ordure, le prophète du mal"
Oh que oui! sa motivation était claire...la trouille.


Il reste que les Hohenzollern ont très vite repris possession de leur beau chateau et que cette famille que je ne connais que très peu a droit à toute notre sympathie ne serait-ce que parce qu'un de leurs ancètres a su renoncer au trône d'empereur d'Allemagne pour profiter de sa belle Bavière.
Allez courage! demain il fera jour
(photos kheper)

mercredi 29 mai 2013

Carte Postale 1 Peyrins km 0


Mon cher Maxence,
Tu vois ça y est nous partons, 6 mois que je te parle de ce voyage, que je change l'itinéraire, sans pour autant n'être fixé que sur la destination : le cap nord
Et maintenant à l'heure du départ je ne suis par certain de respecter la carte que tu vois en haut du message précédent (clique dessus pour l'agrandir)
Donc les premières photos, je ne t'en parle pas tu connais, c'est ce qu'on appelle la Drôme des collines....

 Oui je sais ce que tu penses quelle idée d'aller au cap nord quand on vit dans un si beau pays mais voila les hommes sont tous pareils, depuis qu'elle existe, l'humanité veut aller voir ailleurs, là-bas derrière la colline: pourquoi? sais pas... pour voir.....

Allez courage! demain il fera jour
(photos kheper)

dimanche 26 mai 2013

Destination Cap nord

Voila! le départ est imminent, les préparatifs s'achèvent. Il reste à répondre aux questions où? comment? Pourquoi?
Ensuite il faut définir la relation du voyage
où? si tout va bien nous serons au cap nord vers la mi juillet, oui tout en haut de la carte.
Comment? la voiture est prête et l'itinéraire trône en tête de cette page.
Pourquoi? j'espère que ce blog répondra à la question pendant les 3 mois qui viennent.

Reste la relation............... comment raconte t'on un voyage ? le récit brut est souvent lourd, fatigant pour celui qui lit, le journal de bord est certes plus aéré mais oh combien contraignant pour celui qui le tient....

J'opte donc pour un outil que nous avons tous utilisé avant de le ringardiser, un outil qui indique le lieu par une photo et un texte bref qui résume l'attrait de la photo et donne des nouvelles du quotidien, ce que Perec appelle "l'infra-ordinaire".* En deux mots la carte postale.
Par exemple:
"On parcourt la Casamance, temps superbe, j'ai pris un coup de soleil, mais c'est quand même extra, retour le 4"
ou bien :
"Nous vadrouillons en Illyrie, belles plages, ballades à dos de mulet, mille baisers"
ou encore :
"Nous traversons Quiberon, douce inaction, on mange très bien, je prends un peu de ventre. Baisers à vous"

Bref la carte postale c'est le rêve pour tous:
Pour le lecteur qui regarde au moins la photo et quelquefois parcours le petit texte.
Pour celui qui écrit, à son rythme, loin de la corvée quotidienne.
Bref (deuxième) la carte postale c'est la liberté! vive la carte postale!

Surgit alors une nouvelle question: la carte postale (la vraie si j'ose dire) a un destinataire désigné mais un bloc notes s'adresse à qui veut (c'est aussi son charme) celui-ci par exemple est lu par les amis mais aussi dans des contrées aussi reculées que les USA, la Belgique, la Lithuanie, le Pakistan, le Brésil, les Pyrénées atlantique et j'en passe (nous avons depuis cette nuit un lecteur aux iles Caïmans): nouveau casse tête, que faire?
Vous ne m'en voudrez pas je vais me simplifier la tâche je vais adresser mes cartes postales à une seule personne qui sera votre représentant à vous tous qui me lisez (je sais c'est facile mais je n'ai pas mieux là maintenant tout de suite)
Bien sur pour ne pas le gêner (c'est un garçon discret) vous ne connaîtrez que son prénom et pour le reste il présente deux avantages primordiaux à mes yeux il me comprend et il est tolérant au sens voltairien du terme et puis...je n'ai pas à me justifier!
Et bien nous y sommes il ne reste plus qu'à mettre le contact et à envoyer ma première carte à mon correspondant (très courte car le point de départ il connait)
Allez courage! demain il fera jour

* les citations sont tirées d'un petit recueil de Georges Perec "l'infra-ordinaire" (éd du Seuil)
"les journaux parlent de tout sauf du journalier, ce qui se passe vraiment, ce que nous vivons, le banal le quotidien où est-il?"










jeudi 23 mai 2013

Les amis de Georges


"Les amis de Georges étaient un peu anars, ils marchaient au gros rouge et grattaient leur guitare" Moustaki a écrit cette chanson en hommage à Brassens son ami à qui il avait même emprunté son prénom.
Son vrai prénom à lui le métèque c'était Iosif  (Youssef à Alexandrie où il est né), Joseph en français une de ses plus belles chansons.
Souvenez-vous nous avions 16 ou 18 ans et ce barbu calme et doux nous envoyait ses poésies sur fond de musique nonchalante jouée à la guitare.
Nous fredonnions la carte du tendre, ma solitude, ma liberté; Ah liberté le mot le plus prononcé de ces années là où rien ne semblait pouvoir nous arrêter.
C'était un an après 68 et nous avions immédiatement adopté et placé Georges dans nos guitares avec Maxime le Forestier surgi la même année, de part et d'autre du Maître Georges Brassens.

Alors voilà:  Moustaki collait à son époque passant de la frivolité (donne du rhum à ton homme) à la politique (sans la nommer, Sacco et Vanzetti) sans jamais oublier la tendresse (votre fille a 20 ans)


"Nous prendrons le temps de vivre, d'être libres, mon amour, sans projet et sans habitude"
Salut Georges,

Allez courage! demain il fera jour.
(photos kheper)

vendredi 17 mai 2013

hommage à Elisée

Après 47 jours d'hibernation, je reprends le fil des messages de ce blog par une nouvelle rencontre. Est-ce un hasard? le second message daté du 4 novembre 2012 évoquait les mémoires de Pierre Kropotkine et citait déjà un de ses amis Elisée Reclus, géographe comme lui, révolté comme lui contre toutes les formes d'injustice et à ce titre ayant comme lui été emprisonné puis banni de son pays.
Il est des hommes dont la vie est un roman (j'ai évoqué ici Kropotkine donc mais aussi Yersin et Hessel) Elisée Reclus est de ces hommes là. Promis à devenir un modeste pasteur du sud-ouest de la France, il quitte tout pour le continent américain où il découvrira sa véritable vocation: la géographie mais abordée sous un angle profondément humaniste. Sa révolte commence avec la découverte de l'esclavagisme pour s'étendre à l'ensemble des opprimés une fois revenu en Europe. Il sera de tous les combats contre l'oppression jusqu'à participer à la commune de Paris qui lui vaudra le bannissement.
Toute sa vie il alterne entre son grand oeuvre (sa géographie universelle en 19 volumes mais aussi histoire d'un fleuve, histoire d'une montagne) et les écrits engagés.
Dans une brochure intitulée les produits de la terre il résume son combat:
"Partout nous voyons l'injustice régner, c'est en sens inverse du travail que sont distribués les produits du travail. L'oisif a tous les droits même celui d'affamer son semblable tandis que le travailleur n'a pas toujours le droit de mourir de faim en silence [.....] les gens appelés rois se disent issus d'un maître universel pour être maîtres à leur tour; des gens armés par eux taillent sabrent et fusillent à leur aise; des personnes en robe noire qui se disent la justice condamnent le pauvre, absolvent le riche; des marchands distribuent du poison au lieu de nourriture [.....] Tout cela nous parait infâme.
Le monde a t-il tellement changé depuis cet écrit de 1875? Notre presse bien polie se fait l'écho de scandales et les traite comme des épiphénomènes : produits alimentaires trafiqués, produits pharmaceutiques dangereux ou pire immeubles insalubres qui s'effondrent............
Mais quel est le vrai scandale? un immeuble qui s'effondre et tue 1100 ouvriers (ça nourrit la presse quelques jours) ou le fait que des millions de personnes travaillent jour après jour dans des conditions proches de l'esclavage.

Allez courage! le scarabée est réveillé et demain il fera jour

photo: Jean-Didier Vincent: Elisée Reclus géographe, anarchiste, écologiste (Robert Laffont 2010)